Publié le jeudi 1 octobre 2009 à 04:00
Photo France-Soir
Enfant, les géants le faisaient marrer. Chaque lundi de Pentecôte, sa vieille tante invitait la famille pour la fête des géants du village. Stéphane Deleurence se souvient de la foule en liesse, de la musique entraînante, du sourire des gens et de ses yeux émerveillés devant la beauté des géants… Devenu adulte, Stéphane a choisi de prolonger son enfance. Depuis trente ans, cet artiste plasticienne donne naissance à ces grandes figures du folklore populaire du nord de la France. Il a déjà réalisé plus de 50 géants et ne compte pas s’arrêter là. Il crée, restaure ou refait à l’identique, selon la demande. Les créateurs de géants sont peu nombreux. Le travail de Stéphane Deleurence est reconnu et apprécié même en Belgique où certaines communes font appel à ses mains d’or.
Il y a quelques mois, la ville de Lesquin est venue passer commande. La commune, soutenue par les membres d’une association, a décidé de faire revivre leurs géants, Hyppolite le garde-champêtre et sa femme Titée. « Avant de se lancer dans la fabrication d’un géant, il faut penser au local qui l’accueillera, aux porteurs qui le feront sortir et aux personnes qui s’occuperont de son entretien », explique Stéphane Deleurence. L’homme a installé son atelier dans sa maison à Beaucamp-Ligny, près de Lille. Comme bon maître d’oeuvre, il fait tout de A à Z. Dans son jardin, différentes espèces de rosier s’épanouissent. Il s’en sert pour confectionner la structure du géant. Stéphane travaille le cuir, le rotin, la terre glaise, le métal, le plâtre, le tissu, le papier… Le crin de cheval peut servir à l’élaboration des sourcils et des cheveux. Si une barbe où une chevelure doit frisotter, il se sert de papillotes en plomb.
Exercice périlleux
Chaque géant représente entre 400 et 500 heures de travail. Stéphane commence toujours par la structure puis les bras, le visage et les mains. La réalisation d’un géant peut paraître facile mais l’exercice est périlleux. « Le géant doit être léger tout en étant costaud. Il doit être démontable, facile à porter, résistant à l’eau et les vêtements doivent pouvoir s’enlever facilement pour être nettoyés. Il faut arriver à faire un ensemble cohérent. » Stéphane se charge aussi de la réalisation des accessoires. Pour Titée, il s’agira d’une cafetière. Quant à Hyppolite, un tambour, un sabre et un chapeau compléteront le personnage. Toute la ville de Lesquin est associée à cette aventure. Dans quelques jours, Stéphane se rendra dans l’école de la commune pour expliquer son travail aux enfants. « Je viens avec mes dessins pour leur montrer comment seront Hyppolite et Titée. J’apporte aussi du rosier, de la terre pour leur expliquer ce que l’on peut faire avec. Ils se sentent concernés. » Rien de plus normal. Quand les géants sont de sortie, ils représentent les gens de sa commune. Ils contribuent à donner une identité à des populations aux prises avec les difficultés économiques et sociales de la vie moderne. Quand les deux géants seront terminés, ils seront baptisés lors d’une cérémonie officielle. Les habitants de Lesquin attendent ce jour avec impatience.